Évia (ou Eubée)

Le vent a bien soufflé toute la nuit mais Poséidon a  veillé sur nous. Au matin question ? On y va, on n'y va pas ? Finalement on se décide à partir pour une courte étape de 16 milles mais longue en temps. Face au vent et aux vagues au moteur, pas d'autre solution pour passer ce couloir entre le continent et la longue île de Makronisos. Un bateau est déjà parti, un autre se prépare quand nous partons. Au début encore sous le cap Sounion on avance assez vite mais le vent monte, rafales jusqu’à 28 nds, les vagues grossissent et notre vaillant petit moteur a parfois du mal à  nous faire avancer à 3nds (un peu plus de 5kms/h), faut dire aussi que l'hélice bipale ne favorise pas les excès de vitesse. On se fait doubler par des bien plus gros que nous qui ont des chevaux dans la cale. La plupart s'arrêtent dans un port plutôt industriel. Nous, même pas peur, on continue !  Devant le cap Vrisaki la mer est complètement hachée, des vagues dans tous les sens et on avance vaillamment à  2.4 nds, au moins on a le temps de voir le paysage ! Rien d'autre à faire dans notre panier à  salade que d'attendre que ça passe en mangeant un bout pendant que le pilote fait son travail comme il peut. Finalement on arrive dans l’après midi à  Porto Rafti, une grande baie profonde et protégée par deux îles qui cassent la houle. C'est assez moche, plein d'immeubles et de maisons sans harmonie, un genre Palavas ou Carnon  où les Athéniens viennent en week-end (en fait Athènes est à moins d’une heure). Finalement on repère un coin tranquille à l'écart un peu moins moche que le mouillage principal, bien à l'abri derrière un petit cap et pas loin d'une plage, trois bateaux sont amarrés là sur des corps morts, on se glisse au milieu. Un peu de houle mais nuit tranquille.

Vendredi matin superbe lever de soleil.

Des cygnes viennent nous dire bonjour, on leur lance quelques miettes du p'tit déj.

Départ pour notre dernière étape plein  Est direction Karystos sur l'île d'Evia. Une longue bande de terre de 200kms proche du continent à l'est d'Athènes.  Assez vite le vent se lève par le travers 15 à 19 nœuds. 1 ris dans la grand voile, génois roulé au 1e point, le bateau est bien équilibré et on trace à plus de 6nds. Belle revanche sur hier, Marie se régale à barrer mais on a sorti les cirés  ça mouille un peu et le fond de l’air est frais, l'été s'en va.

A 6 ou 7 milles de l'arrivée le vent passe de Nord 15 nds à Sud 3 nds en 30 secondes….. Pourtant aucun relief nous masque le vent. Mystère des vents grecs. On va faire les derniers milles juste avec le génois au  vent arrière. On avance quand même à  2.5 nds avec 4 à  5 nds de vent réel. Même vitesse qu'hier mais question ambiance ça n'a rien à voir : juste le glissement sur l'eau au soleil. Ça fait travailler la finesse de la barreuse.. .On met le moteur au dernier moment à l'entrée du port. Tout un quai pour un cata et nous. Dans la soirée  arrive un bateau de français qui ont une maison dans le coin. On discute un peu. On va récupérer le fourgon chez Panagiotis le patron de Karystos Marine, il est lavé,  les clés sur le contact. RDV est pris pour lundi midi pour mettre le bateau à terre. C'est vendredi, les terrasses des cafés sont pleines, les grecs déambulent, pas de touristes à part nous. Ça change des autres étapes.  

Samedi après un changement d'amarrage,  on commence à préparer le bateau,  grand rinçage des voiles, du pont, de l'annexe. Tout ça au soleil et sans vent, une aubaine pour faire sécher les voiles. Voilà on est sur le retour. Des bateaux grecs arrivent, toute une bande en balade. Enfin des petits bateaux comme nous.

Ça c'est quand le port de Karistos est bien rempli, de quoi faire rêver ceux qui ne naviguent que du côté de Port Macabre ou de la Grande Motte.

Dimanche relâche, vers 11h on renoue avec le fourgon pour balader vers l'est et trouver les gorges de Kalianou..  on bifurque vers une plage Potami lieu improbable avec sans doute une petite vie l'été. La montagne est couverte de bruyères en fleur, après les pluies de Zorbas..  On croise une forêt d'éoliennes qui ne chôment pas. On traverse un petit hameau de maisons de guingois ,  ça ne respire pas la richesse, quelques mamies en noir sur le pas de la porte. On  arrive au bout d'une route qui se transforme en chemin sans issue surplombant la mer.. Idéal pour faire ½ tour.. On a loupé la route, pas étonnant c’est une piste, qui est en travaux pour devenir une route.. On met 100 ans pour faire 20 kms.. De plus il faut éviter le lézard ocelet qui traverse, la tortue (40 cms environ) qui va cahin caha,

on lève des rapaces à chaque virage, les chèvres et  boucs, très belles cornes torsadées , sont installés au milieu de la route.

. tout en  surplombant la mer sur une piste vertigineuse.. là je regrette vraiment que le fourgon n'ait pas la conduite à droite.. C'est magnifique mais lorsque je croise le vide j'ai l'impression qu'il m'appelle.. Terrifiant.. JJ conduit tranquille, heureusement je ne lui colle pas ma frousse. On se croirait en Irlande version soleil.. Pourtant on est à seulement quelques kilomètres des Cyclades, là juste en face cachées par la brume. Pour ce qui est de croiser, il faut anticiper les rares endroits où on peut se tasser (sur la droite, non !!!). Ça doit être magnifique au printemps.. Malgré l'aridité de la fin de l'été, de nombreuses sources, cascades coulent et grondent.

Des châtaigniers (il doit y avoir des champignons  !) côtoient des oliviers.. Puis on retrouve la civilisation signalée par les poteaux électriques puis la route redevient un peu goudronnée .. Ah on voulait du sauvage, on a été gâté.. On longe les gorges étroites très raides.. la différence vient du chemin goudronné mais c'est toujours une succession d’à pics  avec vue sur la mer  et vents violents.

Arrêt pour cueillir des arbouses, les arbres en sont claffis avant  Paradisi village en montagne. Ici pas de maisons blanches et bleues, les vieilles maisons sont en pierre, toit plat. On se croirait dans les montagnes du Maroc . 

1ere taverne ouverte Platanos depuis qu'on est parti, il est 16h on s'arrête pour manger un bout et récupérer de nos émotions..  Malgré la lenteur du service « siga siga »,  c'est très bon, chèvre sauce citron et ragout d'agneau à la tomate le tout fondant dans la bouche.. En plus on a droit au dessert offert, marmelade au nèfle ou à la courge. Yessss
Retour à la maison, euhhh au voilier à la presque nuit..

On s’apprête à passer la dernière nuit sur India et sur l'eau.. snif...